Le mur de Larressore et les grandes guerres

En janvier, un grand mur de Larressore est apparu embelli d’une immense fresque portant l’inscription “Luttons contre le fascisme”. Disons d’emblée qu’il est plus que nécessaire de se mobiliser contre le fascisme, d’autant plus qu’il a le vent en poupe à travers le monde.
{up readmore=Laburpena euskaraz | textless=Laburpena hetsi | class=up-readmore resume-eus}Pasa den urtarrilean, faxismoaren kontra borrokatzeko tindaketa handia agertu zen Larresoron, neurriz kanpoko erreakzioak piztuz. Gabi Daraspek gauzak beren lekuan kokatzen ditu hemen.{/up readmore}
Le Pays Basque n’échappe pas à ce fléau : l’extrême droite progresse aux élections, et ici aussi, les agressions se multiplient. Il faut donc lutter contre le fascisme et le courant réactionnaire qui se répandent dans les institutions, dans la rue, sur les réseaux sociaux et dans les esprits. La fresque de Larressore n’est pas la seule : on peut se réjouir que ces derniers mois, des slogans antifascistes fleurissent dans divers recoins du Pays Basque (bravo aux artistes !). Plus largement, c’est sur tous les fronts qu’il faut s’organiser pour faire face aux fascismes.
Laurence Samanos, maire de Larressore, a déposé plainte pour “vandalisme”. Selon la législation française, juridiquement, le vandalisme est considéré comme une “dégradation volontaire”, et donc, les graffitis, fresques ou tags entrent généralement dans cette catégorie, bien que, selon moi, le mur de Larressore ait été embelli plutôt que détérioré. Pourtant, la notion de vandalisme suggère une intention malveillante, une destruction gratuite. Rapidement, certains politiciens ont vu là l’occasion de polémiquer, car le mur en question, en plus d’être très visible depuis l’axe principal reliant Saint-Jean-Pied-de-Port à Bayonne, sert aussi d’enceinte au cimetière de soldats de la Première Guerre mondiale.
Sous ce prétexte, une tentative de criminalisation publique de la revendication politique a été lancée, et il est révélateur de voir qui en sont les auteurs : Franck Leroy, représentant du Medef au Pays Basque Nord, Jean-Michel Iratchet, figure locale du Rassemblement national, et Max Brisson, membre des Républicains. Ce dernier qualifie les inscriptions antifascistes “d’ignobles”. Une droite qui se revendique républicaine et qui s’indigne d’un message contre le fascisme : si quelqu’un avait encore un doute, c’est clair, il n’y a plus de ligne rouge.
Bien qu’ils préparent le terrain à la répression en criminalisant les militants politiques, il était évident que les tombes situées derrière ce mur n’étaient pas la cible de la fresque - au point que même les gendarmes menant l’enquête sont arrivés à cette con-clusion. Pourtant, d’une certaine manière, cette fresque a bien un lien avec la guerre, mais pas en raison des sépultures qu’elle jouxte. Il se trouve qu’elle est apparue le jour où, à l’appel de GKS, des milliers de personnes ont manifesté à Bilbo et à Iruñea. Ces manifestations appelaient la jeunesse travailleuse à être en première ligne non seulement contre le fascisme, mais aussi contre la guerre.
Les morts reposant dans ce cimetière de Larressore - et tant d’autres - furent justement les victimes de la rivalité entre les impérialistes capitalistes de l’époque. Ce sont les Franck Leroy, les Jean-Michel Iratchet et les Max Brisson d’alors qui ont envoyé des millions de personnes à la mort, avec le soutien de tout l’arc parlementaire, y compris la gauche social-démocrate. Tout cela sous prétexte de “défendre la patrie”. De la même manière, aujourd’hui aussi, ce sont les grands bourgeois qui veulent nous mener à la guerre, et les idées des fascistes épousent de mieux en mieux leurs intérêts : leur nationalisme xénophobe exacerbé justifie le soi-disant besoin de se protéger des “ennemis” intérieurs et extérieurs. Cela n’empêche que différentes tendances politiques formulent aussi leurs prétextes particuliers pour justifier la guerre des capitalistes : défense de l’Europe, de la démocratie... Tout comme en 1914, lorsque tous les partis politiques soutenaient la guerre, aujourd’hui, la droite et la gauche du capital s’accordent sur le renforcement de l’armée française, préparant ainsi une nouvelle grande guerre.
Il est donc impératif de faire face à ces partis et politiciens qui défendent, jusqu’à la mort, la soif de profit de l’oligarchie. Jusqu’à la mort, dis-je, mais pas la leur, bien sûr, celle des travailleurs et travailleuses qui subissent la guerre et l’austérité… Car pendant qu’ils prétendent sacraliser les morts, ils sacrifient les vivants.
Continuons à diffuser les revendications, à nous mobiliser, à lutter et à nous organiser contre la réaction, le fascisme, mais aussi contre la guerre et l’austérité.